martes, 20 de noviembre de 2018

El hechizado teatro de Borges en Ginebra.


El artista ginebrino  Yuval Dishon y su compañía Zanco invitan a perseguir al autor de culto de "Ficciones" en las bibliotecas

En este lugar del mundo, bajo ese cielo nocturno, solo podía haber él. Fue la otra noche en Cologny (GE), en la Fundación Bodmer, este libro, el paraíso. Jorge Luis Borges, su delgadez como escritor, su elegancia como notario, cuidaba los tesoros de la casa, la sabiduría del alba, el testamento de un poeta. En el salón, había una treintena de espectadores intrigados, listos para seguir al autor del Libro de Arena, sus gafas ciegas y su bastón hasta el final de sus quimeras.

Esta brujería, se lo debemos a la compañía de Ginebra Zanco y su director Yuval Dishon. Han estado trabajando durante doce años, en los parques, los bosques, los sitios de construcción de nuestras ciudades, principalmente en Ginebra, Lausana y La Chaux-de-Fonds a veces. Sus variaciones de Borges se basan en el espíritu del lugar: es el sello distintivo de la compañía. En la Fundación Bodmer, antes de la Biblioteca de la Unión este viernes, acompañamos a este Borges, un títere en verdad.

La bestia emerge del libro.

igues al mago? Bajamos por una escalera, hacia otra cripta donde duermen las letras de Ferdinand Hodler, y allí, allí, un poema del propio Borges. Delante de ti, se abre un libro: sale una página extendida, luego una ola de papel, un vestido también con una joven envuelta. Y luego, en este mar de libros, se alza un bote infantil. El capitán Ahab truena, a raíz de Moby Dick. En un momento, aparecerá la bestia, llevada con los dedos por un titiritero.

El hombre frente a sus monstruos. Esta es la línea de flotación de las variaciones de Borges, un sueño musical que gana fuerza al desplegar sus tentáculos. En la última estación, este hombre-libros (Borges dirigió la Biblioteca de Buenos Aires) toca una vieja máquina, manipulada por una tierna actriz como Maria Kodama, la mujer de su vida, tal vez. En el fondo, de repente, un esqueleto, una muerte, sin duda, desafía a un anciano en el ajedrez.



Le théâtre ensorcelé de Borges à Genève

L’artiste genevois Yuval Dishon et sa compagnie Zanco invitent à poursuivre l’auteur culte de «Fictions» dans les bibliothèques

A cet endroit-là du monde, sous ce ciel de nuit pleureuse, il ne pouvait y avoir que lui. C’était l’autre soir à Cologny (GE), à la Fondation Bodmer, ce paradis du livre. Jorge Luis Borges, sa maigreur de scribe, son élégance de notaire, veillait sur les trésors de la maison, la sagesse de l’aube, le testament d’un poète. Dans la salle, on était une trentaine de spectateurs intrigués, prêts à suivre l’auteur du Livre de sable, ses lunettes d’aveugle et sa canne jusqu’au bout de leurs chimères.

Cette sorcellerie, on la doit à la compagnie genevoise Zanco et à son metteur en scène Yuval Dishon. Ils œuvrent depuis douze ans, dans les parcs, les bois, les chantiers de nos villes, principalement à Genève, à Lausanne et à La Chaux-de-Fonds parfois. Leur Borges Variations puise dans l’esprit des lieux – c’est la marque de fabrique de la troupe. A la Fondation Bodmer – avant la Bibliothèque de la Jonction ce vendredi – on escorte donc ce Borges, une marionnette en vérité.

La bête surgie du livre

Vous suivez le mage? On descend un escalier, en direction d’une autre crypte où sommeillent les lettres de Ferdinand Hodler, et tiens, là, un poème de Borges lui-même. Devant vous, un livre s’ouvre: s’en évade une page à rallonge, bientôt une vague de papier, une robe aussi dans laquelle s’enroule une demoiselle. Et puis voilà que sur cette mer livresque se cabre un bateau enfantin. Le capitaine Achab tonne, dans le sillage de Moby Dick. Dans un instant, la bête apparaîtra, portée du bout des doigts par un marionnettiste.

L’homme face à ses monstres. Telle est la ligne de flottaison de Borges Variations, ce songe musical qui gagne en force à mesure qu’il déploie ses tentacules. A la dernière station, cet homme-livres – Borges a dirigé la Bibliothèque de Buenos Aires – tape sur une vieille machine, manipulé par une comédienne tendre comme Maria Kodama, la femme de sa vie peut-être. Au second plan, soudain, un escogriffe squelettique, la mort sans doute, défie un vieillard aux échecs.

Fuente: Le Temps



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